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La fausse suivante ou le fourbe puni, de Marivaux, Théâtre sortieOuest
, Béziers, 30 novembre, 1er décembre 2012

La Fausse suivante a été créée la saison dernière à Chambéry, et saluée par une presse enthousiaste. Dans une exacte fidélité au texte, Nadia Vonderheyden apporte une vision singulière, une ambiance magique de fin de carnaval où chacun joue le tout pour le tout. Une troupe admirable de jeunes acteurs sert cette farandole de stratagèmes et de mensonges, avec une vitalité qui exalte l'intelligence tactique des protagonistes, toujours prêts à reprendre le dessus même quand les circonstances les accablent.


La fausse suivante ou le fourbe puni, de Marivaux © DR
La fausse suivante ou le fourbe puni, de Marivaux © DR
La scène est en province. Pour connaître Lélio, à qui on la destine sans même l’avoir rencontré, une jeune parisienne se déguise en chevalier et se lie d’amitié avec son prétendant. Lequel, abusé, mis en confiance, avoue son penchant pour deux dames presque également riches…
La travestie complote alors sa vengeance. Séduction, argent, pouvoir, travestissement sont au coeur des débats. Ici, les personnages se perdent dans leurs propres mensonges et leurs viles
intentions. Dès lors, la comédie écrite en 1724, renvoie à une réalité très actuelle où le matérialisme supplante l’être.
Pour Marivaux, les principes du travestissement, de la duperie (et donc du théâtre) ont la faculté de révéler le revers de la personnalité, d’exhiber le spectre de leurs vrais dessins.
Parallèlement, dans La Fausse suivante, l’illusion et la tromperie rendent possible, à chaque instant, la rêverie.
Marivaux écrit La Fausse suivante en 1724, c’est une année qui marque une grande rupture tant au niveau personnel que dans son travail théâtral. Il perd tous ses biens en 1720 dans la faillite
de la banque Law, un banquier écossais, et perd sa femme en 1723. Louis XIV meurt en 1715, on est passé de l’absolutisme à la Régence ; en 1723 Louis XV arrive
au pouvoir. On est donc dans des temps de transformation politique, économique et sociale, les modèles sociétaux se transforment et donc les modes de représentations changent.
Dans la pièce, six personnages se côtoient et s’entremêlent, trois valets, trois nobles, chacun défendant âprement leurs intérêts et leurs gains, chacun ayant à perdre gros, de sa fortune
et de lui même. Parmi ces six figures, deux font alliance dès le début, finalement ceux qui ont tout à gagner et peu à perdre, une femme travestie en homme, le Chevalier, et Trivelin, un
homme sans situation, qui passe d’un état à un autre, faisant fortune ou la perdant. Quand la pièce commence, il vient de tout perdre (situation dans laquelle se trouve Marivaux) et se fait
embaucher par Frontin comme valet.
Ce travestissement va agir comme un « trouble dans le genre », bouleversant et re-questionnant l’ordre des désirs chez chacun. On pourrait faire un parallèle lointain avec le jeune homme
de Théorème de Pasolini.
La Fausse suivante est en effet une des rares pièces de Marivaux qui ne finit pas sur un « happy end », mais comme sur un suspens après que l’on ait vu chacun des protagonistes se battre
entre désirs et mensonges, alliance et survie. Ils sortent de cette bataille comme hagards, ne sachant bien quelle expérience exactement ils viennent de faire, mais défaits, troublés.
On voit bien en quoi Marivaux peut être un des annonceurs (même malgré lui) de la révolution à venir, d’un « intenable » de cette société où une noblesse dépérit, où une bourgeoisie financière prend sa place, pendant que des valets commencent à nommer leur condition, où les contrats qui s’y contractent doivent se repenser ; contrats d’intérêts et contrats amoureux ; l’ancien ordre des choses commençant à se fissurer, place est faite pour que de nouveaux désirs émergent, y compris violemment.
Tout cela est pris dans un lendemain de bal, où interviennent des chants et des danses, faisant relais à ces joutes oratoires que sont les dialogues de Marivaux, où chacun faisant face
à l’autre, improvisant ses réparties, se découvre lui-même ; où chaque joueur est pris à son propre jeu. Où, masqués, voulant démasquer l’autre, ils se révèlent à une partie d’eux-mêmes.
N. V.

Comédienne et metteur en scène, Nadia Vonderheyden se forme au théâtre en suivant les ateliers de Didier-Georges Gabily dès 1985, puis en participant au groupe Tchan’G.
Elle joue sous la direction de Stéphane Braunschweig dans la Trilogie des hommes de neige ; François Tanguy dans le Chant du bouc, Choral et la Bataille du Tagliamento avec le Théâtre du
Radeau ; Jean-François Sivadier dans la Folle journée ou le Mariage de Figaro, la Vie de Galilée, Italienne scène et orchestre, le Roi Lear, la Dame de chez Maxim, Noli me Tangere…
Parallèlement à son travail de comédienne, elle est assistante à la mise en scène et collaboratrice artistique avant de mettre en scène l’Ami retrouvé de Fred Uhlmann, puis, avec Nicolas
Bouchaud la Matière Antigone d’après Henry Bauchau (spectacle de sortie des comédiens de l’école du Théâtre National de Bretagne). Elle a également dirigé des ateliers et des résidences
à l’université de Rennes II et à l’ERAC de Cannes. Elle a mis en scène Gibiers du temps de Didier-Georges Gabily (2003), Médée de Sénèque (2006), Nuage en pantalon d’après Maïakovski (2006).
A la Cigalière - Scène associée de sortieOuest

Pratique

La fausse suivante ou le fourbe puni, de Marivaux

mise en scène Nadia Vonderheyden
avec
Mohand Azzoug, Catherine Baugué, Julien Flament, Arnaud Troalic, Lamya Regragui, Nadia Vonderheyden...
Durée 2h10

vendredi 30 novembre 2012 - A Sérignan, La Cigalière - Scène associée - 16€/12.5€/11€/6€
samedi 01 décembre 2012 - A Sérignan, La Cigalière - Scène associée - 16€/12.5€/11€/6€

Renseignements et réservations
04.67.28.37.32
www.sortieouest.fr

Tarifs : 16€/12.5€/11€/6€

Théâtre sortieOuest

Domaine départemental d'art et de culture de Bayssan

34500 Béziers

Pierre Aimar
Mis en ligne le Samedi 10 Novembre 2012 à 23:53 | Lu 442 fois

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